E04 : Celui qui en savait trop… peu

E04 : Celui qui en savait trop… peu
Think outside of the box ... but where is the box ?

Mr. "Je-sais-tout"

Alex était encore dans l'euphorie des dernières semaines. L'écoute active fonctionnait ! Il se sentait plus proche de son équipe, les discussions étaient plus fluides. Il avait l’impression d’avoir enfin trouvé la clé.

Ce matin-là, Clara frappa à la porte de son bureau.

— Alex, on a un problème avec le planning de production. Il y a un retard sur la livraison des composants.

Sans réfléchir, Alex se redressa. C’était exactement pour ça qu'il était manager ! Trouver des solutions. Résoudre les problèmes.

— Ok. Hum… On pourrait contacter le fournisseur pour négocier un envoi partiel ? Ou alors, voir si on peut avancer sur d'autres productions en attendant ? Peut-être même qu'on pourrait…

Il parlait vite. Trop vite. Il était déjà en train de dérouler trois scénarios possibles, prêt à foncer dans la solution, sans prendre la peine d'écouter Clara, les habitudes ont la vie dure.

Mais Clara restait silencieuse, hochant simplement la tête.

Alex fronça les sourcils. Pourquoi ne disait-elle rien ?

— Clara…que se passe-t-il, ai je dit une bêtise ? Vous avez déjà résolu le problème ?

Clara esquissa un sourire gêné.

— Oui… On a ajusté l’ordre de production pour minimiser l’impact. Je voulais juste te tenir informé.

Alex sentit son ventre se nouer.

— Pourquoi tu ne me l’as pas dit directement ? demanda-t-il, intrigué.

Clara haussa les épaules.

— Je ne voulais pas te contredire… et j’ai pensé que peut-être tu avais une meilleure idée…

Alex sentit une gêne monter en lui. Son équipe avait-elle peur de lui ? de ses réactions ? ou avait-elle simplement encore besoin de son avis ?


Ce ne sont plus des enfants

Le soir, il retrouva Philippe, son ancien entraîneur de natation.

— Je crois que mon équipe a encore trop besoin de moi. Même quand ils ont les solutions, ils viennent vérifier que c’est la bonne.

Philippe haussa un sourcil.

— Tu les fais encore marcher avec une laisse invisible ?

Alex sourit. Son coach avait toujours eu le don des métaphores directes.

— Qu’est-ce que tu veux dire ?

— Tu as déjà appris à un enfant à faire du vélo ?

— Oui, pourquoi ?

Philippe prit une gorgée de tisane avant d’expliquer :

— Quand tu lui enlèves les petites roues, il n’a pas besoin que tu tiennes le vélo. Il a besoin de savoir qu’il PEUT pédaler seul. Tu peux courir à côté, mais si tu tiens encore la selle, il va s’accrocher à toi et ne pas oser prendre son équilibre.

Alex hocha lentement la tête.

— Tu veux dire que je dois leur dire clairement qu’ils peuvent avancer sans moi ?

Philippe esquissa un sourire.

— Est-ce que tu dis à ton enfant qu’il peut le faire sans toi ? Ou est-ce que tu le laisses essayer ?

Alex sentit une première prise de conscience s’installer.


Se tromper deux fois, c’est une faute…

Le lendemain, en réunion d'équipe, il annonça :

— Écoutez, je me suis rendu compte d’un truc: vous avez souvent les bonnes solutions avant même que je vous réponde. Alors à partir d’aujourd’hui, je vous fais confiance. Vous n’avez plus besoin de venir valider toutes vos décisions avec moi. Je reste disponible, mais vous pouvez avancer par vous-mêmes.

L'équipe sembla agréablement surprise, et Alex sentit une énergie positive circuler dans la salle.

Mais quelques jours plus tard… il constata quasiment aucun changement.

Les collaborateurs continuaient de venir le voir pour valider leurs choix.

— Mais… je vous ai dit que vous pouviez décider sans moi ! protesta-t-il un jour devant Sam.

Sam haussa les épaules :

— Ouais, mais si on se trompe ? Si ça foire ?

Alex croisa les bras.

— C’est votre décision, donc votre responsabilité.

Aussitôt, il vit une lueur d’inquiétude dans le regard de Sam.

Il se mordit la langue. Il voulait responsabiliser son équipe, pas leur faire croire qu’il s’en lavait les mains. Il devait trouver un autre angle.


Où tu vas sans ton casque ?

Un peu plus tard dans la semaine, lorsqu’un projet connut un imprévu, Sam hésita avant de venir voir Alex.

Cette fois-ci, Alex décida de ne pas répondre immédiatement.

— Que proposes-tu ?

Sam réfléchit.

— Je pense qu'on peut corriger en faisant la mise à jour que l’on reporte depuis des mois… mais j’ai peur que ça ne fonctionne pas.

— Que risque-t-on ?

— Financièrement pas grand-chose, ça risque de nous prendre du temps et de devoir faire deux fois le travail.

— Et si ça fonctionne ?

— Ça serait une petite révolution pour le service support, ça fait des mois qu’il le demande.

— Qu’en penses-tu ?

Sam souffla et haussa les épaules.

— Je crois qu'on devrait le tenter.

Alex sourit légèrement.

— Alors parle-en avec le support, et décidez ensemble.

Il dut se mordre la langue pour ne pas intervenir davantage. Il n'était pas encore convaincu que c'était la meilleure solution, mais ce n'était pas son rôle de décider à leur place.

À sa grande surprise, l’expérience, malgré quelques incidents, fut une réelle réussite.

  • Les coûts étaient finalement moindres.
  • Grace à leur collaboration, l’équipe support avait trouvé des ajustements qui réduisaient les risques.

Sam, lui, avait gagné en assurance.


La loi des 4P

Lors de sa séance suivante de « I love my boss » avec son coach, Max, Alex partagea son apprentissage.

Max éclata de rire.

— Formidable, tu viens de trouver la formule magique !

Il nota au tableau :

Permission + Protection = Performance + Plaisir.

Max posa son marqueur et observa Alex.

— Pour quelqu’un qui pensait qu’il n’était pas assez dans l’action, tu viens de mettre ton énergie sur la partie la plus importante.

Il s’adossa au mur et repris un ton plus grave.

— Beaucoup de managers pensent que la culture d’entreprise est figée, qu’ils en héritent et doivent simplement s’y conformer ou la perpétuée. Mais elle est vivante, parce qu’elle est constituée d’êtres humains.

Quand on veut faire coller les gens à une culture figée, on les transforme en robots. Et c’est là que les problèmes commencent.

Il marqua une pause avant d’ajouter :

— On en reparlera bientôt. Mais félicitations, Alex. Ceci est ton premier vrai pas vers le véritable leadership.


📌 À retenir :

L’autonomie ne se décrète pas, elle se construit progressivement.
Donner la permission ne suffit pas, il faut aussi assurer une protection.
La confiance grandit dans un environnement où l’erreur est acceptée et encadrée.
Un manager efficace ne résout pas les problèmes, il crée les conditions pour que son équipe trouve ses propres solutions.

📖 À suivre !